Politique de santé : une approche intégrant l’ensemble des problématiques

Posted by kineblog on January 13, 2008

L’Ă©ditorial du n°50 de la revue adsp (ActualitĂ© et dossier en santĂ© publique, la revue trimestrielle du Haut Conseil de la santĂ© publique) mĂ©rite d’ĂŞtre lu, et mĂ©ditĂ©:

adsp n° 50 mars 2005
Jean-Pierre Claveranne
Professeur des universités, université Lyon III, Lass-Graphos CNRS
membre du Haut Comité de la santé publique

Le secteur de la santé, comme tous les autres secteurs de l’économie, est désormais entré, dans les pays développés, dans l’ère des rendements non proportionnels et/ou décroissants : des ressources de plus en plus importantes améliorent de plus en plus difficilement l’état de santé de la population voire, dans certains cas, le dégradent.
De ce fait, malgré la mise en place de mesures pour réduire les dépenses de santé, celles-ci continuent à croître. Un véritable « mur d’entropie » semble s’être installé entre les budgets dédiés aux systèmes de santé et la santé des populations.
Pris en étau entre le maintien et l’exigence de l’équité et les pressions économiques, acculées dans une impasse décisionnelle en matière de politique de santé, la majorité des pays développés recherchent aujourd’hui d’autres mécanismes que les mécanismes financiers pour rationaliser les dépenses de santé.
Cette démarche s’effectue selon trois constantes : l’élargissement nécessaire des objectifs de santé non plus restreints au secteur des soins mais à l’ensemble des déterminants de la santé, l’intégration des usagers et citoyens aux processus de décision en matière de politique de santé, et la nécessaire définition d’objectifs communs aux parties prenantes du système de santé hiérarchisés selon des priorités de santé.
Trois logiques majeures influencent les dispositifs, la logique des health targets influencée par l’OMS, la logique de soins influencée par le besoin de rationalisation de l’offre de soins et la logique matricielle qui intègre un ensemble d’influences et les combine.
La logique health target est considérée de plus en plus par les acteurs de terrain et la littérature comme non opérationnelle, car trop exhaustive et peu réaliste. La logique de soins est jugée trop restrictive et beaucoup trop axée sur les considérations économiques.
La logique matricielle, qui combine des priorités verticales, horizontales et transversales, apparaît comme vecteur de cohérence et de lisibilité pour les acteurs.
À l’inverse des deux premières qui ont plutôt tendance à s’inscrire dans une dynamique de rupture/juxtaposition plutôt que dans une dynamique d’infléchissement, la logique matricielle propose une réflexion globale intégrant l’ensemble des problématiques de santé dans un schéma unique. Chaque partie prenante peut se positionner dans son activité et dans ses interrelations avec les autres activités. Cette logique s’appuie non pas sur une rupture, mais sur un repositionnement de l’existant au regard des problématiques. Elle consiste non pas en un bouleversement des actions, mais dans une réinscription de celles-ci dans un cadre finalisé différemment. Cette logique dynamise les acteurs dans le sens où, pour chaque ligne de la matrice, un chef de projet est nommé et pour chaque intersection, ligne-colonne, une cellule de coordination est mise en place. Les limites résident alors justement dans cette action pluridimensionnelle complexe qui oblige à raisonner sur l’ensemble et à travailler de concert.
Cela bouleverse les lignes hiérarchiques et oblige à de nouvelles formes de régulation des actions individuelles basées sur la coordination, l’autorité rationnelle légale et des espaces de délibération clairement définis et organisés.
Un des défis majeurs en termes de santé publique auquel sont confrontés les pays développés est le nécessaire travail à réaliser pour mettre en perspective objectifs et priorités de santé avec les déterminants de santé. Ce défi implique d’ouvrir le champ et l’organisation de la santé publique à l’ensemble des acteurs concernés, et non pas seulement aux seuls professionnels
de santé. Une telle ambition passe, au plan de la recherche, par des fertilisations croisées entre épidémiologie, sciences de la vie et sciences sociales, au plan de l’action par la prise en compte de la dimension santé publique dans toutes les décisions, dans toutes les actions d’évaluation qui concernent de près ou de loin la santé des citoyens, au plan de la citoyenneté par l’ouverture des conférences de santé sur le monde économique sans exclusive.
La démocratie sanitaire, qui ne peut se résumer à la seule participation des usagers ou de leurs représentants, est à ce prix.

http://www.hcsp.fr/hcspi/docspdf/adsp/adsp-50/ad500101.pdf

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Comments

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  1. JLE Tue, 15 Jan 2008 19:03:25 CET

    La pĂ´ compris

  2. admin Tue, 15 Jan 2008 21:43:28 CET

    Normal, c’est une rĂ©volution!
    Et aussi de la SF, car pour le moment nous sommes gravement dans “la logique de soins influencĂ©e par le besoin de rationalisation de l’offre de soins”, et puis basta…